lundi 5 juillet 2010

Haïti 1 : 0 Monsanto

Vous aurez bien entendu compris qu'il ne s'agit pas d'un score de la Coupe du Monde de football mais l'ambiance est tellement footbalistique (quoi que... avec la défaite du Brésil et l'Argentine, le pays soit assez en berne) que cela a inspiré le titre de cet article.
Tout a commencé il y a plus d'un mois, quand dans le contexte de soutien à la production agricole après le séisme, Monsanto a communiqué avoir fait un don de semence de maïs. Et là branle-bas de combat, quoi des OGM en Haïti? L'univers altermondialiste et cybernétique s'affole. Le ministère de l'agriculture a répondu officiellement qu'il ne s'agissait pas d'OGM puisqu'Haïti n'a pas de législation en la matière mais le problème reste entier.
Il ne s'agit donc pas d'OGM mais d'hybrides, une norme dans les pays développés. Il s'agit en fait de semences avec un meilleur potentiel productif mais dont les semences ne sont pas réutilisables. 1er couac: il faudra que les paysans haïtiens rachètent chaque année leurs semences, ce qui 1) n'est pas dans leurs habitudes; et 2) cela coûte assez cher.
2ème couac: ce type de semence permet d'augmenter la production effectivement mais si et seulement si elle bénéficie d'un paquet technique = engrais, pesticides, herbicides. Or Haïti est pour le moment assez peu consommatrice de ces produits.

d'où le don philanthropique (dixit le porte-parole de la firme) n'en n'est pas vraiment un car il rendra les Haïtiens dépendant de cette firme et des autres firmes agro-chimiques. On sait les dégâts sociaux que cela cause en Inde ou des milliers de producteurs de coton se suicide chaque année, accablé par le poids des dettes contractées pour acheter semences et produits.
Monsanto ne chercherait-il pas un nouveau débouché face aux critiques qui se multiplie à travers le monde?
Et que dire des précautions sanitaires à prendre pour manipuler ces produits et qui sont inconnus des paysans Haïtiens.

Il existe heureusement en Haïti des organisation rurales/de paysans très informées et qui bénéficient du réseau de la Via Campesina. On parle beaucoup du MPP (mouvement paysan papaye) et de son leader charismatique Chavannes mais il existe bien d'autre à travers le pays (KROSE, Tet kole ti peyizan...). Ces organisations ont donc organisé une marche le jour de la fête de l'environnement. Plus de 10,000 personnes, essentiellement des paysans ont répondu à l'appel et ont créé un évènement médiatique, bien loin des turpitudes de la reconstruction de la capitale.


Le combat n'est évidemment pas terminé et chacun poursuit son plaidoyer et sa lutte contre Monsanto, ces semences et le type d'agriculture qu'elles véhiculent. Le Monde, Libé en parle... Chavannes a même rencontré le responsable de l'USAID, l'agence de coopération américaine qui finance le projet à travers lequel les semences sont distribuées. Le petit poucet contre le l'ogre. Une partie des semences est en effet déjà dans le pays, pourra-t-on bloquer les autres?

Que retenir de cette leçon?
Que des petits paysans d'un pays en développement ont réussi à faire un gros raout et menacer une grande firme contre laquelle les mêmes agriculteurs en France se battent avec plus ou moins de succès!

Si vous voulez en savoir plus, écoutez l'émission "c'est pas du vent" du 23 juin sur RFI.

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